grisou a écrit:zantafio a écrit:.....faire des promos pareilles pour attirer les mélomanes..
...
ils devraient
élargir l'offre en terme de style musical
Elle est déjà (un peu) élargie...
- musique du monde, dim 20/11/22
- concert pour les tout petits (idée géniale d'ailleurs), dim 11/12
- ciné-concert: La grande Évasion, direction Dirk Brossé, ven 16/12
- concert pour les tout petits, 14/5/23 - Expérience ultra-sensorielle qui vise à développer les capacités psychomotrices des enfants à travers de la musique
- spectacle tous publics tiré d'un conte d'Andersen, dim 21/5/23
Et de nouveaux concerts pourraient même s'ajouter à mon avis, dans le fil de la saison.
...mais pas élargie, comme tu le suggères, au jazz et au blues, c'est vrai.
Note que je ne suis pas sûr que l'acoustique le permette, jazz et blues étant trop souvent systématiquement
amplifiés. Or cette salle est conçue pour la musique acoustique (= non-amplifiée).
=> y jouer du jazz
enfin non-amplifié ?
Car jouer de la musique amplifiée dans dans une telle acoustique n'est sans doute pas possible (vécu: l'intelligibilité des voix des chanteurs -et des instruments- est hallucinante; par contre, un orateur y prenant la parole brièvement pour une annonce, à partir d'un micro et un système amplifié, y est presque difficilement audible; c'est très surprenant).
Des salles "polyvalentes" ?Et les salles dites "polyvalentes" (conçues acoustiquement pour jouer indifféremment de la musique amplifiée et non-amplifiée) sont une ineptie d'un point de vue acoustique: on sait maintenant que ça ne fonctionne pas, et on a arrêté d'en concevoir depuis longtemps (
ou alors on conçoit une salle modulaire avec une puissante infrastructure motorisée pour pouvoir reconfigurer les parois et la géométrie, et faire p.ex descendre le plafond, adapter la scène, voire raccourcir la longueur de la salle - la Koningin Elisabethzaal a cette capacité, mais ce n'est pas tout-à-fait le même budget: €90 millions! C'est plus de 4 fois plus que le budget du Namur Concert Hall, selon les infos qu'on peut trouver sur le Web).
Quid alors du jazz (et autres styles) au Namur Concert Hall (Grand Manège)?Il reste que, pour revenir au
jazz (que je connais mal) ou à
d'autres styles:
La voix peut poser problème (si inaptitude du chanteur). Et pour le jazz, je ne sais pas.
Détaillons:
- pour ce qui est de la
voix non-classique (dans les "
autres styles"):
d'autres artistes -non-classiques- pourraient-ils chanter au Namur concert Hall?
Oui, sans doute. Mais il faut savoir chanter sans amplification, donc savoir sacrément bien chanter, car aucune correction numérique dans une sono, inexistante ici, pour corriger la voix de ceux qui chantent faux: l'artiste est "tout nu" devant le public. Et dans une telle salle,
tout s'entend.
J'aime aussi beaucoup Agnes Obel. Mais sa petite voix sussurante, sans micro et amplification c'est impensable. Elle se produit cependant à la Philharmonie de Paris cette saison, donc en sonorisé/amplifié bien sûr. Mais la salle de la Philharmonie de Paris est précisément reconfigurable, entre autre par un plafond à hauteur variable. Et on parle d'une salle au coût de...€534 millions! Et qu'est-ce que ça donnera avec Agnes Obel? Nous verrons les commentaires.
La salle du Namur Concert Hall est sise dans le complexe du Grand Manège, qui est aussi le siège d'un conservatoire, et du CAV&MA, Centre d'Art vocal et de Musique Ancienne. La salle est avant tout un
outil qui pousse l'intelligibilité (acoustique) très loin. Elle partage avec la Philharmonie de Paris le privilège d'un ratio de 13m³/auditeur, le ratio le plus élevé au monde (et 10m³/auditeur pour la Philharmonie de Berlin). Ce ratio détermine d'ailleurs en grande partie le RT60 (à Namur, 2,2sec salle remplie et 2,6sec salle vide). Je suis sûr qu'à l'avenir, des labels viendront de plus en plus enregistrer dans cette salle (ça commence déjà). Et qu'elle pourrait devenir
la salle dans laquelle il faut avoir été enregistré
- (un peu comme Deutsche Grammophon venait enregistrer ses opéras à l'Auditorium de la Maison de la Radio -Flagey- après les modifications acoustiques apportées par le professeur Fritz Winckel de la Technische Universität de Berlin, vers 1962-63, qui en avaient fait le meilleur studio d'Europe; modifications qui ont été ôtées lors de la rénovation de Flagey en 2000 < La Semaine du Son, 2021 - il est vrai que les polyèdres appliqués par Fritz Winckel ne cadraient pas du tout, esthétiquement, avec l'architecture initiale, de style moderniste années 30, type "paquebot", de l'architecte Joseph Diongre, à laquelle la Commission des Monuments & Sites voulait impérativement revenir à l'occasion de la rénovation, d'ailleurs superbe - je n'ai évidemment pas connu cette époque, mais on en retrouve des photos, entre autres dans le livret d'un enregistrement du Requiem de Mozart, dirigé par Sigiswald Kuijken, fait au Studio 4 de l'époque).
Je ne dis pas "
pourquoi aller à la Philharmonie de Paris alors qu'il suffit d'aller à Namur ? ", ces salles ne sont pas identiques. Mais au 1/28ème du coût de construction de la Philharmonie de Paris, le complexe du Grand Manège et sa salle Namur Concert Hall sont une réussite architecturale et acoustique proprement étourdissante (être bruxellois n'empêche pas d'être objectif), et qui atteint pleinement son but, dans le coeur de cible (musique
vocale et instrumentale, y compris symphonique,
acoustique càd non-amplifiée). Est-il possible d'y jouer des styles un peu en-dehors de ce coeur de cible, sans en être trop éloigné? Peut-être. Mais elle reste une salle où, par définition, on ne peut pas forcément
tout jouer, il faut l'accepter.
- pour les
instruments non-classiques,
non-amplifiés, et sans voix (
jazz p.ex):
Et bien, je n'ai vraiment aucune idée de ce que ça pourrait donner. Peut-être ont-ils déjà fait des essais.
Serait-ce alors une occasion d'enfin découvrir le jazz "en vrai"? La musique se voyant enfin "décapée" de la couche que surajoutent les sonos, omniprésentes même sur les petits ensembles de jazz?
De la musique amplifiée partout...
De façon générale, la musique (y compris les petits ensembles de jazz) est maintenant amplifié partout, même là où ce n'est pas nécessaire!
De sorte qu'on n'entend plus les instruments, mais
des micros et une sono qui reproduisent ces instruments. On n'entend plus vraiment de musique vivante directement, mais un simulacre (un peu comme l'
ombre d'un objet, qui permettrait de le
reconnaître, et non l'objet lui-même; le problème est que, si on ne voit plus
que des ombres et qu'on ne
connaît pas l'objet, on le prend pour son ombre, dont on se satisfait).
Ceci amène d'ailleurs Roger Skoff à s'interroger très opportunément, dans Stereophile (
The Music Problem, 27-09-22), sur le bien fondé de ce "réflexe" consistant à tout amplifier (NB: il désigne la sonorisation par 'PA', ou Public Adress).
Ce qui l'amène à s'interroger (je résume de mémoire): le fait que, partout maintenant,
une sono s'interpose entre les instruments et le public n'éloigne-t-il pas ce dernier de "la chose même", de la musique vivante et sa "vérité sonore". Et l'
output de cette sonorisation en tous lieux interposée (entre instruments et public) n'est-il pas qu'un
simulacre de cette vérité sonore et musicale, comme l'
ombre de l'objet lui-même? (même si, en haute-fidélité domestique, c'est évidemment un simulacre, et même
par définition puisqu'il s'agit de
reproduction sonore: donc, on n'a pas le choix, on est par définition dans un rapport de copie à modèle; par contre amplifier 4 musiciens de jazz dans une salle modeste pour moins de 100 personnes, est-ce vraiment toujours nécéssaire? On peut y réfléchir).
Cette sonorisation interposée lors des concerts n'
éloigne-t-elle pas le public de la "vraie" musique?
Roger Skoff pose alors les deux questions qui concluent son article:
1. ne serait-ce pas cet
éloignement qui explique que le public n'a, aujourd'hui, plus la moindre idée de
comment ça sonne "en vrai"?
2. Et ne serait-ce pas cette méconnaissance, voire cette ignorance, qui explique le fait que l'immense majorité des gens sont complètement perdus face à l'offre abondante des diverses reproductions sonores telle qu'on peut la rencontrer sur un salon de hifi, par exemple. Et qui expliquerait même l'indifférence d'un public "ignorant" face à un système audio de grande qualité, qui reproduit timbres et voix de façon assez réaliste (car, oui, un système audio, domestique ou pro, de qualité, dit "haute-fidélité", produit un simulacre aussi; mais qui se rapproche bien plus,
malgré l'intermédaire qu'est le disque, de la façon dont ça sonne "en vrai" qu'une sono de concert, même très bonne et bien réglée, qui est qualitativement NULLISSIME en comparaison - "m'enfin, avec une sono, c'est fun et ça gueule!" oui, peut-être bien, et on peut aimer ça, mais ce n'
est pas la réalité: c'est un prisme qui la distord et la biaise avant d'en livrer le résultat à l'auditeur).
Il décrit cette expérience faite de nombreuses fois chez lui avec ses amis, sur sa stéréo performante, et leur indifférence polie mais un peu embarassée face à ce qui ne
ressemble pas au simulacre dont ils ont l'habitude, produit par les systèmes de sonorisation ubiquitaires. Ce simulacre étant bien souvent
la seule expérience sonore et musicale qu'ils connaissent (un peu d'ailleurs comme les prisonniers dans le mythe de la Caverne, de Platon, qui, vu leur disposition enchaînée, ne voient que les ombres des objets projetées devant eux, pas les objet réels eux-mêmes - et, bien sûr, ils prennent les ombres pour la réalité).
Ultérieurement, je placerai tout ça dans un sujet ad hoc, qui me paraît mérité (car je dévie un peu du sujet "concerts" ici).